Cahier n°20 – Lucien KROLL réhumaniser la ville

Sommaire

  • Modernité, modernité, vers une décroissance soutenable
    • Lucien KROLL, architecte
  • L’urbanisme d’Ecolonia, comment tisser la ville avec des composants
    • Isabelle VAL DE FLOR, architecte
  • Requalification urbaine, comment réhumaniser des quartiers
    • Lucien KROLL, architecte
  • Haute Qualité Environnementale et organique en architecture
    • Lucien KROLL, architecte
  • Repères biographiques Atelier A.U.A.I.

Edito

Modernité, modernité, vers une décroissance soutenable

Le bouleversement, la mondialisation, l’aliénation, la biodiversité qui s’effondre, les désastres du climat, la colonisation par « l’association obscène des techniques et des finances » où 20 % de la population en étranglent 8o %… Rien n’est plus comme avant et, actuellement, nous ne pouvons plus nous satisfaire d’un habitat qui n’exprime que le progrès matériel, sa technique et sa conduite « rationnelle » du monde qui éclate de partout. Les gens, d’abord utilement (la machine nous aide), puis maladivement (il faut tout machiniser…) sont partagés entre la fascination « coupable » devant la machine et d’autre part, la quasi impossibilité actuelle de s’en passer ou seulement de la freiner.

Cela produit deux sortes d’architectures irréconciliables : la haute technicité qui permet aux riches de se servir sans honte ni mesure des ressources naturelles, et contraint les pauvres (ou ceux qui choisissent d’être pauvres…) à voir combien ce monde est inhabitable lorsqu’il est calculé parfaitement. Ceux qui projettent encore ce mouvement actuel de gaspillage technique qui enfle de partout, ne peuvent imaginer un avenirqui, en catastrophe, aura détraqué tout notre mécanisme horriblement fragile…

Deux systèmes de décisionsOn doit rappeler qu’il y a officiellement DEUX systèmes contemporains de décision décrits dans les sciences économiques.
Bien sûr, d’abord, le GPS (General Problem Solving) élaboré par Herbert Simon (prix Nobel…) rassemble « toutes » les informations utiles (c’est évidemment absurde : une fois rassemblées, elles bougent…) puis prend des décisions « rationnelles » seulement par rapport à un projet qui fixe définitivement le détail de toutes ses phases d’exécution. Les inconnues y sontjugées négligeables : elles sont pourtant les plus nombreuses et peuvent fausser lourdement les hypothèses. On ne comprend cela que trop tard : le système ne peut plus s’arrêter… Les résultats sont effarants : il n’existe pour eux que des problèmes, jamais de processus aléatoires : la « maison », par exemple, n’est pas un problème : c’est une liturgie… Et en fin de compte, c’est à coup de GPS qu’on a cassé le climat…

À l’inverse, l’incrémentalisme ne veut décider de chaque étape qu’au moment où il l’aborde et pendant son cours : à chaque étape, il regarde en arrière. Il refuse de décider trop tôt les étapes suivantes ni surtout la totalité de l’opération sans la soumettre aux événements de chaque phase. Ainsi la fin n’est pas définie dès le début. L’incrémentalisme est la façon écologique de décider : par la participation continue de toutes les informations et de tous les informateurs qui surgissent au cours de l’opération.
Cette méthode signifie : « On apprend à marcher en marchant ». C’est une méthode intuitive, « darwinienne » à l’image des tâtonnements de la nature…
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Lucien KROLL
Architecte