L’architecture expression vivante du corps humain

Pour une conception non mécaniste du corps humain et de l’architecture

La démarche humaniste proposée par Paul Valéry a été étouffée par une vision mécaniste de l’architecture. L’architecture conçue comme une machine avec ses rouages, ses engrenages, ses fluides, répond à la conception mécaniste du corps humain. Le corps est une grande machine, il lui faut une boîte pour travailler, une boîte pour dormir, une boîte pour manger, etc.

Or, les besoins fondamentaux de l’être humain sont à la fois physiques et spirituels.

« L’âme humaine a besoin de s’approprier un espace qui soit comme le prolongement d’elle-même et du corps » écrira Simone Weil (8).
Comme l’outil est le prolongement de la main pour augmenter sa force, sa précision ou son habileté, l’architecture étend l’espace interne, espace à la fois physique, culturel et symbolique. L’intériorité telle qu’elle est conçue et vécue s’exprime sur les murs des constructions : si cette intériorité est vue de façon matérialiste ou seulement utilitaire, l’architecture est matérialiste et utilitaire ; si au contraire l’intériorité est vécue comme l’association mêlée du corps et de l’âme sans restriction des étendues de l’un et de l’autre, alors l’architecture s’anime de vie et communique.

Lorsque l’espace construit apporte au corps et à l’âme contraintes, nuisances et rigidité et porte atteinte à l’intégrité de l’être humain, alors c’est la fonction première de l’architecture qui n’est plus assurée, celle de satisfaire aux besoins fondamentaux, physiques, psychiques et spirituels de protection, de projection, de perception et de relation aux autres.

Notes :
1 Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, PUF
Paul Valéry, Eupalinos, Poésie Gallimard
2 Johannes W.Rohen, article paru dans la revue no 42/43 d’IFMA international
3 Schwaller de Lubicz, le Temple dans l’Homme, Dervy, p.83 et suiv.
4 Annick de Souzenelle, le symbolisme du corps humain, Albin Michel, p. 170
5 citation dans le catalogue de l’exposition Les Demeures, Centre Pompidou, 1984
6 Annick de Souzenelle, référence citée, p.134
7 Simone Weil, Projet de charte des devoirs envers l’être humain, Ecrits de Londes, Gallimard